jeudi 9 février 2012

Harry Winston, Histoire de Tourbillon 3, revue en 3-D

Le plus explosif « highlight » de ces agapes Genevoises ne se trouvait pas dans un hôtel, au GTE ou au SIHH. Il a été présenté totalement « off the record », directement à la manufacture Harry Winston, à Plan-Les-Ouates, pour la présentation d’«Histoire de Tourbillon 3». C’est la claque de cette « Wonder Week », alors que la créativité semble très largement en berne, cette « Histoire de Tourbillon 3 » arrive avec audace et succède sans aucun temps mort à la génialissime Opus Eleven de Baselworld.

Version anglaise sur watchonista.



Sur le plan mécanique, c’est une synthèse entre le double tourbillon incliné à différentiel d’Histoire de Tourbillon 1 et le tourbillon rotatif bi-axial d’Histoire de Tourbillon 2. Histoire de Tourbillon 3 est composée de deux échappements, l’un rotatif et l’autre monoplan, liés par un différentiel.
Si la technique est une évolution des précédentes « Histoires de Tourbillons », L’habillage emprunte beaucoup à la série Opus, en proposant quelque chose d’inédit dans le domaine du tourbillon rotatif à grande complication.

En vidéo, sans le son, mettez votre morceau préféré, et profitez du ballet de tourbillons :





L’architecture, les volumes et les visuels en général, ont été pensés pour mettre en exergue les tourbillons. Alors que la technologie des tourbillons a explosé ces dix dernières années, en allant toujours plus loin dans la mobilité et la tridimensionnalité , les esthétiques, elles, n’ont jamais été totalement remises à plat pour accompagner ces prouesses technologiques.
On sent parfois la tentation, typiquement Helvète, de fermer les cadrans, afin de cacher cet organe réglant que je ne saurais voir (souvenez-vous de tous ces tourbillons, classiques ou tridimensionnels, avec leurs cadrans gris foncé frappés d’un austère « tourbillon » gris clair sérigraphié).
La logique des créateurs d’Harry Winston a été complètement différente : plutôt que de puiser dans le fonctionnaliste Suisse, ils ont puisé dans la bouillonnante culture New-Yorkaise, pour sublimer la complication en lui fournissant un écrin digne des sculptures exposées dans les galeries d’art du quartier Chelsea.



Au-delà des volumes et des perspectives, ce qui surprend c’est le poids. La montre est composée d’or blanc sur le dessus et de Zallium (alliage de Zirconium) pour la carrure et, logiquement, elle dépasse les 250 grammes.
Elle est volumineuse ; tant son poids que le ballet des trois tourbillons la rendent totalement inoubliable au quotidien. C’est même l’inverse d’une extra-plate des années 50. C’est un peu l’équivalent horloger d’une Supercar, peu adaptée aux zones urbaines, mais qu’est-ce que la route serait triste s’il n’y avait que des citadines. Pareillement, ici on est dans le domaine de la Super-Watch.



La forme TV Screen du boîtier, chère à certains indépendants, permet de bien répartir la masse sur la longueur du poignet (la montre fait 65mm sur 45.9mm), et malgré son volume, la montre reste portable ; néanmoins, n’envisagez pas qu’elle glisse en dessous de vos manches de chemise. Selon toutes probabilités, si vous possédez la somme superlative pour l’acheter, vous aurez les moyens de vous offrir une garde-robe adaptée à cette machine.



La présentation de l’heure est un modèle de simplicité, les heures/minutes sont indiquées à 12h et 1h, et la RdM à 5h. Vous noterez que les indications sont en Français, une preuve de la préoccupation d’Harry Winston de démontrer son ancrage horloger dans la Suisse Francophone. Si les indications sont en Français (un rappel de l’ancrage Suisse d’HW), les complications en Romand, le design lui, est résolument New-Yorkais. Ce trait de crayon emprunte bien sûr à la science-fiction, Cyberpunk en tête, avec son aspect chromé et technique. Mais immanquablement, les critiques vont y voir un design de matériel électronique des 80’s, du Ghetto Blaster à la manette de NES. Et contre toute attente, c’est une excellente grille de lecture alternative de cette esthétique. Ce design emprunte sans aucun doute au Pop’art, dont les racines sont en grande partie New-Yorkaises, à l’instar de Harry Winston.
D’ailleurs, dans son visuel, la pièce tient plus de l’art contemporain que de l’horlogerie. Andy Warhol n’aurait pas renié les volumes plongeants, les angles saillants et l’aspect tridimensionnel complètement bluffant de la pièce au poignet.



Bien évidemment, à la vue du triple tourbillon, l’affichage de l’heure (à 12h et 1h) devient totalement périphérique.
C’est l’ultime avatar de l’horlogerie mécanique de luxe ! En effet, en se déparant des oripeaux traditionnels de l’horlogerie, la HdT3 souligne le ballet mécanique du triple tourbillon. Depuis l’avènement du quartz, l’utilisation de la mécanique relève avant tout de l’esthétique et/ou du dandysme. Ici, plus que jamais, l’heure de précision n’est qu’un prétexte à l’érection d’une cathédrale mécanique. Les bâtisseurs, comme sur la HdT1 & HdT2 sont Steve Forsey & Robert Greubel via CompliTime, le double tourbillon exclusif développé pour Harry Winston fonctionne d’une manière assez différente des organes réglants inclinés à 24° de chez GF. Le principe serait plutôt à rapprocher d’un mix du tourbillon bi-axial de chez Thomas Prescher et du bloc d’échappement rotatif de l’Officine Panerai.
Le travail réalisé sur le tourbillon « principal » est au-delà du bluffant, la cage externe effectue un 360° en 120 secondes. Classique. Mais ! Une seconde cage tournant sur son axe en 40sec est disposée perpendiculairement et embarque le balancier et la roue d’échappement. Ainsi, cette dernière accomplit en permanence une rotation complète sur deux axes.
Ce double tourbillon est accompagné par un tourbillon classique, qui tourne en 36sec sur un seul axe (disposé à 6h). L’énergie fournie par les deux échappements s’appaire au sein du génial différentiel afin de transmettre un flux médian à l’affichage. Au final, si certaines parties du dispositif ont déjà été expérimentées (notamment dans HT1 & HT2), c’est la première fois qu’un tourbillon tridimensionnel est combiné avec un tourbillon linéaire via un différentiel, révolutionnaire !




Au moment où l’horlogerie minimise la prise de risque, Harry Winston avec la HdT3, et à l’image de l’Opus 11, frappe un grand coup avec une montre qui est bien plus qu’une « talking piece » : elle renvoie à des concepts philosophiques et artistiques inespérés en horlogerie.
Mais c’est aussi et surtout, à l’échelle de l’horlogerie HW, le moment où l’exceptionnelle série Opus fusionne avec les autres collections. A suivre…

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